Question n° 4301 : déposée au JO : 26/12/17

travail

Indemnités de trajet

Mme Sandrine Le Feur interroge Mme la ministre du travail sur l’application de l’indemnité de trajet dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

Conformément à l’article 8.17 de la convention collective des entreprises du bâtiment, les salariés travaillant sur des chantiers doivent percevoir des indemnités journalières et forfaitaires dites de « petits déplacements », qui comprennent notamment une indemnité de trajet. Cette indemnité de trajet est destinée à compenser la sujétion que représente pour le salarié le fait de se rendre sur un chantier, c’est-à-dire le temps passé pour rejoindre le chantier et en revenir, étant considéré que ce trajet vient s’additionner au temps de travail.

Dans de nombreuses entreprises du Finistère, le trajet du siège de l’entreprise, où se fait l’embauche, au chantier, où s’effectue le travail, ne s’ajoute pas au temps de travail. Il ne constitue donc pas une contrainte supplémentaire pouvant justifier compensation pécuniaire. En effet, dans ces cas, il n’existe aucune sujétion pour le salarié à se rendre sur le chantier puisqu’il est déjà rémunéré et que le temps de trajet est comptabilisé dans la durée de travail. Pourtant, l’administration fiscale procède à des redressements sur la base d’une interprétation stricte que la Cour de cassation fait de la convention collective du bâtiment et selon laquelle le montant des indemnités de trajet, même non payées, doivent être réintégrées dans l’assiette des cotisations sociales.

Ces redressements pénalisent durement la compétitivité des entreprises en impactant leur trésorerie, c’est pourquoi elle lui demande s’il serait envisageable d’aménager cette disposition en fonction de l’organisation des entreprises.


Réponse publiée le 07/08/2018

La durée du travail effectif est définie à l’article L. 3121-1 du code du travail comme « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ».

Le temps de trajet entre deux lieux de travail (entre l’entreprise et le chantier ou entre deux chantiers) constitue du temps de travail effectif. La Cour de cassation considère que le temps de transport des salariés entre l’entreprise et le chantier doit être considéré comme un temps de travail effectif, dès lors que le salarié doit se rendre dans l’entreprise avant d’être transporté sur le chantier (Cass. soc., 31 mars 1993, no 89-40865 ; Cass. soc., 16 juin 2004, no 02-43685). Dans ce cas, en effet, les salariés se trouvent à la disposition de l’employeur et ne peuvent vaquer à des occupations personnelles.

Ce temps doit être rémunéré comme du temps de travail effectif et ne peut être considéré comme rémunéré ni par l’indemnité de transport, ni par l’indemnité de trajet prévues par la convention collective.

Le régime institué par la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment du 8 octobre 1990, prévoit l’attribution d’une indemnité de trajet qui a pour objet d’indemniser la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d’en revenir. Cette indemnité n’est pas due lorsque l’ouvrier est logé gratuitement par l’entreprise sur le chantier et à proximité immédiate du chantier. Compte tenu de son caractère forfaitaire et du fait qu’elle a donc pour objet d’indemniser une sujétion pour le salarié obligé chaque jour de se rendre sur le chantier et d’en revenir, le juge considère que cette indemnité est due « indépendamment de la rémunération par l’employeur du temps de trajet inclus dans l’horaire de travail et du moyen de transport utilisé » (Cass. soc., 6 mai 1998, no 94-40496).

C’est sur ce fondement que l’administration fiscale procède à des redressements. Dans ces conditions, seule une adaptation de la stipulation conventionnelle à l’origine de la décision de la Cour de cassation, décidée par les partenaires sociaux signataires de la convention susvisée serait de nature à apporter une solution au problème soulevé.