La transition écologique a besoin d'un cadre international solide
COP 30 au Brésil - Financement de la transition, position de la France : y voir plus clair
13 novembre 2025
Je souhaite profiter de ce “Priorité au direct” pour donner mon avis franc sur la COP30 au Brésil. Il m'est arrivé de me demander à quoi servent réellement ces sommets internationaux contre le dérèglement climatique. On y accumule les textes, les déclarations, les promesses… et sur le terrain, dans nos communes et nos régions, on peine parfois à voir les effets concrets. Pourtant, malgré ces doutes, je continue à penser que ces rendez-vous sont indispensables. Moi qui crois profondément à l’échelon territorial, celui où l’on agit, où l’on transforme, où l’on convainc, je sais aussi que la transition écologique ne pourra pas réussir sans un cadre international solide.
C’est dans cet état d’esprit que je regarde l’ouverture de la COP30, à Belém, au cœur de l’Amazonie. Et j’aimerais prendre le temps de vous expliquer ce qui s’y joue.
Il y a bientôt dix ans, à Paris, la communauté internationale s’engageait sur une trajectoire inédite : contenir le réchauffement bien en dessous de 2°C, et poursuivre les efforts pour le limiter à 1,5°C. Cet accord historique a ouvert la voie à une diplomatie climatique plus inclusive et plus exigeante. Une décennie plus tard, le verdict scientifique est sans appel : la planète s’est déjà réchauffée de 1,3°C, et la trajectoire actuelle nous conduit vers 2,7°C à la fin du siècle, selon le dernier rapport du GIEC.
Dans ce contexte, la conférence de Belém ne peut être un simple rendez-vous diplomatique. Certains dirigeants se désengagent, les investissements fossiles dépassent encore les renouvelables, et les crises géopolitiques détournent l’attention comme les budgets... Les besoins d’adaptation, notamment dans les pays du Sud, explosent : jusqu’à 387 milliards de dollars par an d’ici 2030, soit plus du triple des financements actuels. Le paradoxe est là : le financement climatique n’a jamais été aussi élevé, et pourtant jamais aussi insuffisant.
Je soutiens totalement la position française : préserver des équilibres fragiles et clarifier le système. À cet égard, je veux saluer le travail de la ministre Monique Barbut, dont l'expérience et la précision d'analyse apportent un cap utile dans un moment où la gouvernance climatique est particulièrement complexe.
L’enjeu pour la France est de préserver le compromis trouvé lors de la COP29. Mais il faut aussi regarder les choses en face : beaucoup de financements annoncés n’atteignent pas les projets sur le terrain. Le système est trop fragmenté, trop opaque, trop complexe. Une part importante de ces financements prend la forme de prêts, augmentant la dette des pays vulnérables au lieu de les aider.
C’est pourquoi la France plaide pour une réforme en profondeur de l’architecture financière internationale : fusionner, clarifier, simplifier. Ce n’est pas qu’une question technique : c’est décider collectivement comment gouverner l’action climatique au XXIᵉ siècle.
La coalition de Séville, à laquelle la France participe activement, explore des pistes nouvelles, comme une taxation des jets privés ou des vols très haut de gamme afin d’alimenter la transition mondiale. Pour certains, ce n’est qu’un symbole ; pour moi, c’est une évolution nécessaire : les usages les plus carbonés doivent contribuer davantage à l’effort climatique. Et demain, ces mécanismes pourraient être étendus à d’autres secteurs encore insuffisamment régulés, comme le maritime ou le numérique.
Accueillir une COP au cœur de l’Amazonie revêt une portée symbolique forte, mais cela appelle aussi des engagements concrets. Le Brésil est à un moment charnière : entre un modèle extractif et une transition durable. Nous attendons des avancées sur la déforestation, la transition énergétique, et un développement économique qui protège les territoires amazoniens.
Dans ce contexte, l’accord UE–Mercosur revient forcément dans les discussions. Et je veux être très claire : je suis opposée à cet accord, parce qu’il crée une concurrence déloyale pour nos agriculteurs, menace les écosystèmes et manque cruellement de garanties climatiques. Il faut être cohérent : on ne peut pas demander aux pays de réduire la déforestation tout en soutenant un accord commercial qui, dans sa forme actuelle, l’encourage indirectement.
Dix ans après les accords de Paris, nous n’avons plus besoin de nouvelles promesses : nous avons besoin de preuves. Les solutions existent. Les financements progressent. Les technologies sont disponibles. Ce qui manque encore, c’est la capacité collective à aligner nos économies sur nos engagements.
Je garde l’espoir que cette COP30 marque un tournant : le passage d’une diplomatie du climat à une véritable économie du climat, où chaque décision d’investissement, qu’elle soit publique ou privée, s’inscrit dans la transition écologique.
Je reste convaincue que la transformation se construit dans les territoires, mais qu’elle a besoin d’une vision globale cohérente. Les deux ne s’opposent pas : ils se renforcent.