Depuis plusieurs semaines, le débat sur la réintroduction des néonicotinoïdes pour la production de la betterave sucrière a été ouvert.

L’intensité des débats, de tous bords politiques, montre l’enjeu sociétal que représente leur ré-autorisation ou non dans le cadre du projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire.

Nous ne pouvons être insensibles à la situation des salariés du secteur agro-industriel employés dans les sucreries françaises qui risqueraient de perdre leurs emplois si tous les outils de production venaient à fermer. Mais nous savons aussi que la production agricole subit des fluctuations importantes d’un mois à l’autre, d’une campagne à l’autre ou d’une décennie à l’autre. Cela induit très clairement des pertes ou des gains, en termes de volumes et en termes économiques, qui peuvent s’avérer importants d’une année à l’autre.

Le métier d’agriculteur consiste à tirer le meilleur profit des ressources de la terre mais il exige aussi d’accepter l’existence d’aléas météorologiques, climatiques, sanitaires ou encore économiques de la mise en production.

Or, ces dernières années, une conjonction de ces aléas a conduit à une chute des retombées économiques pour les producteurs de betteraves à sucre : fin des quotas européens de sucre conduisant à des productions excédentaires, effondrement des cours mondiaux du sucre, augmentation de l’offre de sucre indien sur le marché mondial induisant une concurrence accrue, variations climatiques, sécheresse en Europe, virus de la jaunisse notamment. Tout cela a déréglé l’équilibre permettant à l’exploitation de la betterave sucrière de dégager d’importants profits faisant de la France un pays exportateur de sucre.

Mais la course à la concurrence ne résoudra pas la question de notre souveraineté alimentaire. On constate par ailleurs une demande croissante en sucre bio. Or, le prix payé producteur à la tonne est supérieur au conventionnel, bien que les rendements soient moins bons. Il permet également de favoriser l’emploi de main d’œuvre pour le désherbage. C’est en ce sens que je soutiens la conversion en agriculture biologique de la filière betteravière française.

Il est également de la responsabilité des betteraviers d’honorer leurs engagements auprès des sucreries et de faire valoir ces fluctuations des niveaux de production auprès de leurs coopératives, dont ils sont parfois les administrateurs. Le choix des variétés les plus adéquates est un autre facteur à ne pas négliger.

Notre vote sera donc un choix de société. Je m’oppose à la ré-autorisation des néonicotinoïdes pour la culture de la betterave. L’autorisation des néonicotinoïdes est un retour en arrière et la porte ouverte à tout autre type de dérogations. Cela ouvre aussi la possibilité aux acteurs de penser qu’à n’importe quel moment, nous pourrons maintenant revenir sur des lois promulguées en amont. Cela n’est pas au bénéfice du nécessaire rétablissement de la confiance démocratique de manière plus générale et à chaque avancée que nous gagnerons sur la réduction des pesticides, la méfiance s’installera sur la réalité de leur concrétisation. Je défends ainsi le principe de non-régression inscrit dans la loi biodiversité du 8 août 2016.

Néanmoins en raison de la crise passagère vécue par les betteraviers français et afin de garantir la poursuite de la production de sucre, je soutiens l’indemnisation exceptionnelle des producteurs de betteraves sucrières avec la contrepartie d’un engagement de leur part de maintenir les niveaux de surfaces agricoles exploitées pour les trois campagnes à venir.