Question n°42745 – Publiée au JO le 23/11/2021

Réglementation de l’activité de détection de métaux

Mme Sandrine Le Feur appelle l’attention de Mme la ministre de la culture sur la réglementation de l’activité de détection de métaux de loisir.

La législation relative à l’utilisation des détecteurs de métaux est restée inchangée depuis l’adoption de la loi n° 89-900 du 18 décembre 1989 relative à l’utilisation des détecteurs de métaux et son décret d’application n° 91-787 du 19 août 1991, tous deux codifiés à droit constant dans le code du patrimoine. Elle pose comme préalable à l’utilisation de détecteurs de métaux pour la recherche de monuments et objets pouvant intéresser la préhistoire, l’art ou l’archéologie, la délivrance, par le préfet de région, d’une autorisation, qui se fonde sur les qualifications du demandeur et sur son projet scientifique, c’est-à-dire la nature et les modalités de recherche. La détection de métaux en tant que loisir est ainsi totalement interdite.

La détection de métaux est pourtant une activité qui mérite d’être encouragée tant elle peut être bénéfique aussi bien pour le corps et l’esprit des pratiquants que pour la sauvegarde du patrimoine et l’avenir de la planète. Elle comprend ainsi un volet non négligeable de dépollution des sols des métaux. L’activité consiste en effet à se balader dans les champs, avec l’accord du propriétaire, mais au hasard, et à balayer le sol au rythme des pas.

Dans ce cadre, les utilisateurs de détecteurs de métaux accomplissent des missions désintéressées de dépollution et de recherche d’objets perdus, à la demande de propriétaire, d’exploitants de terrains ou de collectivités. Ces missions ont pour but de supprimer tout élément pouvant être préjudiciable au bon fonctionnement des machines agricoles ou au bétail parcourant ces terrains, retrouver des objets égarés, et dépolluer les lieux publics. Globalement, l’activité compte près de 120 000 pratiquants en France.

Elle peut également contribuer à la sauvegarde du patrimoine par la découverte d’objets ayant un intérêt artistique ou archéologique, mais ces derniers peuvent difficilement être déclarés au profit de l’intérêt public en raison de la non-reconnaissance de l’activité à l’origine de la découverte. Cela revient à assimiler la détection de ces objets, qui ne seraient pas recherchés sans l’activité des détectoristes, à du pillage de propriété publique. Le détectoriste français se trouve dans une situation insondable : s’il trouve un objet pouvant intéresser l’art, l’histoire ou l’archéologie, il est dans l’impossibilité de le déclarer aux autorités sinon il s’expose à des sanctions puisque l’activité n’a pas de reconnaissance propre. Il ne lui est pas non plus possible de garder l’objet chez lui, car ce fait est qualifié de recel de biens archéologiques. Reste donc uniquement la solution de laisser l’objet dans le sol, tout en sachant qu’il sera donc perdu pour la recherche historique. Bien qu’utile, leur démarche est néanmoins sans cesse remise en cause. Un amalgame est fait entre ces prospecteurs respectueux des sites archéologiques et de la loi, et les pilleurs utilisant des détecteurs de métaux, ravageant le travail des archéologues.

Connaissant son terrain, passionné, le détectoriste pourrait devenir un véritable auxiliaire pour l’archéologue ou l’historien. Cela est le cas dans certains pays d’Europe du Nord où une coopération existe entre les utilisateurs de détecteurs de métaux et les services archéologiques, ce qui alimente une base de données commune. En voulant protéger le patrimoine, la législation française interdit aux détectoristes de sauver de l’oubli ou de la destruction le petit patrimoine qui se trouve dans le sol.

Une évolution de l’encadrement de l’activité de détection de métaux pourrait permettre une meilleure collaboration entre tous les acteurs. Les prospecteurs souhaiteraient par exemple la mise en place d’un cadre juridique en vue de pacifier les relations entre détectoristes et archéologues et, de ce fait, permettre une collaboration bénéficiant aux deux parties, comme la création d’un régime de déclaration aux autorités compétentes dès lors que d’éventuelles découvertes d’intérêt sont faites.

Mais la découverte d’un bel objet historique au moyen d’un détecteur de métaux par un passionné reste un exploit rare. Les tonnes de déchets, en particulier de métaux ne sont en revanche pas une vue de l’esprit. Par conséquent, afin d’encadrer une pratique permettant à ces prospecteurs de se rendre utiles tout en continuant à vivre leur passion, elle souhaite connaître les mesures qui pourraient être prises par le Gouvernement en vue d’établir une charte nationale permettant cette collaboration.

Réponse publiée le 28/12/2021

L’article L. 542-1 du code du patrimoine conditionne l’usage d’un détecteur de métaux à l’effet de recherche de monuments ou d’objets pouvant intéresser la préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie à la délivrance d’une autorisation préfectorale.

Cette restriction protège le patrimoine archéologique, ressource fragile et non-renouvelable, en laissant aux personnes présentant les compétences scientifiques et l’expérience nécessaires la responsabilité de déposer des projets de recherche et de mener les opérations prescrites ou autorisées par l’État.

En effet, la restitution historique et scientifique, ainsi que la valorisation publique des résultats de la recherche, sont des corollaires indispensables aux opérations de fouilles, les vestiges archéologiques, qu’ils soient mobiliers ou immobiliers, relevant du patrimoine commun de la Nation.

C’est pour cette raison que l’État requiert, pour délivrer l’autorisation d’utiliser un détecteur de métaux à des fins de recherche archéologique, non seulement une compétence scientifique, mais également un projet de recherche raisonné (art. R. 542-1 du code du patrimoine). Si elle ne prend pas en compte le contexte de découverte, la recherche d’objets à des fins uniques de prélèvement prive en effet la recherche archéologique des éléments précieux permettant de restituer le développement de l’histoire de l’humanité et sa relation avec l’environnement naturel, fondements de l’archéologie.

C’est pourquoi le contexte dans lequel s’inscrivent les vestiges fait partie intégrante, en droit français, du patrimoine archéologique (art. L. 10-1). C’est également pour protéger au mieux le patrimoine que la découverte de vestiges pouvant intéresser la préhistoire, l’histoire, l’art ou l’archéologie fait l’objet d’une obligation de déclaration (art. L. 531-14 du code du patrimoine), quelles qu’aient été les modalités de la découverte. Le non-respect de cette obligation de déclaration peut faire l’objet de poursuites (art. L. 544-3).

Ce sont les raisons pour lesquelles l’assouplissement de la législation en vigueur n’est pas envisageable. En revanche, tout amateur passionné d’archéologie peut se former sur les chantiers dirigés par des professionnels de la discipline, qui offrent chaque année 1 500 places aux bénévoles.